Face aux obstacles liés à une conjoncture internationale difficile (guerre en Ukraine, Covid-19), au risque de surendettement, à un déficit budgétaire non maîtrisé et aux taux élevés des crédits qui leur sont accordés, les pays du continent gagneraient à compter d’abord sur leurs propres ressources. L’hôte du deuxième sommet consacré à la question (Dakar 2) donne l’exemple à travers un paquet d’initiatives.
Dakar a accueilli pour la deuxième fois le sommet sur le financement des infrastructures en Afrique. La première édition remonte au 15 juin 2014. Elle avait débouché sur l’adoption de la phase 1 du Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA). Sur les seize projets retenus à l’époque la plupart ont été réalisés ou sont en voie de l’être, selon le Premier ministre, Amadou Ba, qui a clôturé le rendez-vous vendredi dernier. L’heure est à la mise en œuvre du PIDA 2. Vingt-deux projets ont été retenus par les communautés régionales (CEDEAO, COMESA et SADC) et les États membres. Pour les financer les pays africains ne vont sûrement pas bouder l’apport des institutions internationales spécialisées et de leurs partenaires étrangers. Mais, ils devront également miser à fond sur leurs propres ressources. «L’Afrique doit d’abord compter sur son investissement interne, si elle veut développer les infrastructures dont elle a urgemment besoin», lançait le Président Macky Sall lors de Dakar 1.
De Dakar 1 à Dakar 2
Le Sénégal n’a pas changé de discours neuf ans plus tard. Mieux, il donne l’exemple depuis l’appel du chef de l’État. Venu baisser les rideaux de Dakar 2, Amadou Bâ a martelé la pertinence d’une telle option. «Face au ralentissement de la croissance économique africaine, conséquence de la guerre en Ukraine et des impacts de la pandémie de Covid-19, nous devons trouver une solution au resserrement des conditions financières mondiales et au risque croissant de surendettement qui affectent le financement des projets d’infrastructures», a-t-il justifié. Le chef du gouvernement a poursuivi : «À cela s’ajoute le seuil de 3% du déficit budgétaire à ne pas dépasser, mais aussi le coût élevé des primes d’assurance, causé par une perception exagérée du risque d’investir en Afrique alors même que pour nombre de pays africains ce risque n’est guère plus élevé qu’ailleurs.» Macky Sall ne cesse de plaider pour une révision des règles d’octroi des crédits export. «L’Afrique a toujours payé cher ses projets à cause de taux d’intérêt élevés», a martelé le président de la République lors de l’ouverture du sommet de Dakar. Le chef de l’État s’est également insurgé contre les délais de remboursement «souvent courts» desdits crédits. En attendant que cet appel soit entendu, le salut de l’Afrique passe par l’autofinancement. Dans ce sens, le Sénégal constitue un modèle parmi d’autres. «Notre pays entend poursuivre le financement des infrastructures nécessaires à l’émergence tout en préservant les fondamentaux macroéconomiques et en limitant la dépendance aux ressources extérieurs», a indiqué le ministre des Finances et du Budget, Mamadou Moustapha Bâ, intervenant lors d’un panel de Dakar 2. Un paquet d’initiativesDans cet esprit, le Sénégal a adopté un paquet d’initiatives telle que l’amélioration de la collecte des impôts et taxes. «On a pu accroître le consentement à l’impôt, même s’il reste encore des niches, a expliqué Mamadou Moustapha Bâ. On a réussi en 2013 à faire une réforme par une simplification des règles et procédures fiscales, mais surtout renforcer le contrat social par des investissements à fort impact.» En plus, le gouvernement sénégalais a entrepris la mise en place d’un dispositif efficace de mobilisation de l’épargne non détenue dans le système financier traditionnel, par le biais d’instruments plus adaptés (microfinance, finance islamique), et l’amélioration des conditions d’accès au système bancaire et financier traditionnel pour accroître les capacités de mobilisation de l’épargne nationale. Pour mettre tous les atouts du côté des pays africans pour le financement de leurs projets d’infrastructures, le ministre des Finances et du Budget a plaidé également
pour l’implication du secteur privé, la collaboration entre États et la mutualisation des efforts dans le cadre de la taxation des firmes multinationales et de l’évitement des transferts de profits. Malgré les efforts consentis ces dernières années, le déficit en infrastructures du continent reste élevé. Six cents millions d’Africains n’ont pas accès à l’électricité, moins de 10% sont connectés à internet et 25% du réseau routier sont pavés. Cette situation coûte à l’Afrique 2% de croissance économique par an et réduit de 40% sa productivité. Pour combler ce gap, les pays africains doivent mobiliser chaque année 130 à 170 milliards de dollars (78650 milliards à 102 850 milliards de francs CFA).