Des combats font rage depuis une semaine dans la capitale du pays, Sanaa.
INTERNATIONAL – Il pourrait s’agir d’un tournant majeur dans le conflit qui ensanglante le Yémen depuis 2012. Les rebelles Houthis ont déclaré lundi 4 décembre que l’ancien président du pays Ali Abdallah Saleh, 75 ans, avait été tué. « Le ministère de l’Intérieur (contrôlé par les Houthis) annonce la fin de la milice de la trahison et la mort de son chef (Ali Abdallah Saleh) et d’un certain nombre de ses éléments criminels », a affirmé la chaîne de télévision des Houthis, Al-Massirah, en citant un communiqué.
Son décès a ensuite été confirmé par une dirigeante de son parti, le Congrès populaire général (CPG). « Il est tombé en martyr en défendant la République », a-t-elle déclaré, attribuant son meurtre aux Houthis.
Une vidéo remise à un journaliste de l’AFP par les rebelles Houthis montre le cadavre de ce qui semble être l’ancien président Saleh.
Après plus de trente années de règne sur le Yémen, Ali Abdallah Saleh avait été contraint de céder le pouvoir à Abd Rabbo Mansour Hadi en février 2012, dans le sillage du Printemps arabe. Il avait scellé deux ans plus tard une alliance avec les Houthis, issus de la minorité zaïdite -une branche du chiisme-, après les avoir longtemps combattus.
Mais cette alliance a volé en éclats au cours de la semaine écoulée. Des combats font rage depuis mercredi dans la capitale Sanaa, que les deux parties rebelles contrôlent conjointement depuis 2014, au détriment du gouvernement internationalement reconnu d’Abd Rabbo Mansour Hadi réfugié à Aden, dans le sud. Ils avaient fait jusqu’à lundi matin au moins 100 morts et blessés -des combattants mais aussi des civils-, selon des sources de sécurité et hospitalières.
Dans un développement spectaculaire, Ali Abdallah Saleh avait même tendu la main à l’Arabie saoudite samedi, proposant à Ryad de « tourner la page » en échange d’une levée du blocus qui étrangle la population. Les Houthis avaient dénoncé une « grande trahison ».
Les derniers développements font craindre des risques encore accrus pour la population, notamment à Sanaa: non seulement des affrontements entre rebelles se poursuivent, mais la capitale a été secouée dans la nuit de dimanche à lundi par des raids aériens. Lundi, la coalition sous commandement saoudien a demandé aux civils de se tenir à « plus de 500 mètres » des zones contrôlées par les Houthis, a rapporté la chaîne de télévision saoudienne Al-Ekhbariya.
Parallèlement, d’après des habitants, les combats qui ont éclaté entre factions rivales de la rébellion se sont étendus hors de la capitale. Des sources tribales à Sanhan, ville natale de l’ancien président Saleh, au sud de Sanaa, ont indiqué que des violents combats avaient opposé les deux camps dans la nuit de dimanche.
Opération « Sanaa l’Arabe »
Face à la fin de l’alliance rebelle, l’actuel président Hadi a « donné pour ordre à son vice-président Ali Mohsen al-Ahmar, qui se trouve à Marib (100 km à l’est de Sanaa), d’activer la marche (…) vers la capitale », a annoncé lundi un membre de son entourage. Baptisée « Sanaa l’Arabe », l’opération -à l’issue plus qu’incertaine- consisterait à prendre la capitale en tenailles sur plusieurs fronts, notamment à l’est et au nord-est. Selon des sources militaires loyalistes à Marib, sept bataillons ont reçu l’ordre de marcher sur Sanaa sur le front est.
La guerre au Yémen a fait plus de 8750 morts depuis l’intervention de l’Arabie saoudite et de ses alliés en mars 2015, et le pays est aujourd’hui confronté à la « pire crise humanitaire du monde » selon l’ONU. Le conflit avive les tensions régionales autour de la rivalité entre l’Arabie saoudite sunnite et l’Iran chiite, accusé par Ryad de soutenir militairement les rebelles Houthis, ce qu’il réfute.