Attentat de Paris : Samy Amimour, itinéraire d’un radicalisé

Selon ses proches, la vie de Samy Amimour «a basculé» le 15 octobre 2012. A 7 heures du matin, des agents des services de renseignement cagoulés et armés «défoncent la porte» du modeste appartement de cette famille de Drancy, en Seine-Saint-Denis. Soupçonné de nourrir un «projet de départ avorté vers le Yémen», Samy est mis en examen à l’issue de quatre jours de garde à vue pour «association de malfaiteurs terroriste» et immédiatement placé sous contrôle judiciaire. Sa mère et son père, Mounia et Azzédine, en sont alors persuadés : c’est cette interpellation «traumatisante», sous les yeux de ses parents «menottés dos à dos» et de sa jeune soeur, qui a «motivé son départ». «Quand ils l’ont ramené à la maison, il m’a dit « Papa, j’ai rien fait’’. Il n’avait fait que regarder des sites islamistes. C’est pas interdit», affirme son père à l’AFP.

Deuxième d’une fratrie de trois, Samy, 28 ans, a toujours vécu chez ses parents et a travaillé 15 mois comme chauffeur de bus à la RATP avant de démissionner en 2012. Ses parents, des Français d’origine algérienne qui «fêtent Noël autant que l’Aïd», ont du mal à croire à sa radicalisation. D’autres témoignages laissent penser l’inverse. Il fréquentait la mosquée du Blanc-Mesnil, «il avait demandé à sa mère de se voiler. Son père, qui parle très bien l’arabe, l’accompagnait à la mosquée, lui traduisait des textes, pour partager quelque chose avec lui», raconte sous couvert d’anonymat une amie de la famille à iTélé.

Samy Amimour, itinéraire d’un radicalisé© iTélé Samy Amimour, itinéraire d’un radicalisé

« Un mec en or, une proie parfaite »

Quant à elle, la mère de Samy garde le souvenir d’un jeune «très gentil» que «tout le monde aimait», «un mec en or, une proie parfaite» pour les recruteurs au jihad. Un avis partagé par un de ses voisins qui était avec lui au collège Paul-Bert. «C’était quelqu’un de bien, bon élève. Quelqu’un comme nous, très naturel». A tel point qu’une voisine se demande «comment on lui a lavé le cerveau».

Le 11 septembre 2013, Samy Amimour part définitivement en Syrie. Ses parents l’ignorent, mais un mandat d’arrêt international est aussitôt délivré contre lui. «La veille, alors que je m’apprêtais à partir, il m’a fait la bise. D’habitude, c’était « salut, bonne route »», raconte son père, Azzédine, qui avait une affaire en Belgique et ne revenait que le week-end. Quelques jours plus tard, il téléphone à ses parents pour leur dire: «Ne me cherchez pas, je suis en Syrie.» Quelques mois plus tard, fin juin 2014, Azzédine entreprend de s’y rendre via la Turquie. Un périple qui l’amène à changer sept fois de voiture. Il débarque alors dans la région d’Alep le jour de la proclamation du califat de l’organisation État islamique le 29 juin. A force de ruse, il parvient à voir son fils en tête-à-tête pour le convaincre de rentrer. Samy ne voit pas pourquoi il le suivrait… Pour le jeune homme, il est déjà trop tard.

Mi-octobre, Samy rentre sans prévenir ses parents

Du côté de Drancy, Mounia, qui travaille dans une école maternelle auprès d’enfants handicapés, frappe à toutes les portes, de la maire à l’imam Chalghoumi. Sans résultat. Le père se rend en Jordanie pour voir un «émir haut placé de Daech» : «Ton fils, je te le fais sortir à la minute. A une seule condition : qu’il m’en fasse la demande», lui promet-il. Une demande qui n’arrivera jamais. Quelques semaines après, le couple apprend que Samy, avec lequel ils sont en contact par Skype, s’est marié avec une Française et qu’ils attendent un enfant. Une nouvelle qui ruine leurs derniers espoirs de le revoir un jour parmi eux.

Mi-octobre, Azzédine se préparait à un nouveau voyage pour récupérer son fils. Mais Samy est finalement rentré. Sans prévenir ses parents. Le jeune homme est revenu pour commettre, avec six autres kamikazes, les attentats les plus meurtriers de l’histoire de France.