Un Front national en tête, mais dans des proportions plus importantes qu’escompté par les instituts de sondage, des Républicains dont la victoire annoncée sera forcément ternie par cette poussée de l’extrême droite, et des socialistes en chute libre…
Le premier tour des élections régionales, dimanche 6 décembre, semble avoir confirmé, mais aussi amplifié, les estimations réalisées par les instituts de sondage dans les derniers jours de la campagne.
Selon les résultats du ministère de l’intérieur, le Front national recueille 27,96 % des suffrages exprimés, devant l’union de la droite formée par Les Républicains, le MoDem et l’UDI (26,89 %). A gauche, le PS plafonne à 23,33 %.
« Le Front national est le seul front véritablement républicain », a affirmé la présidente du parti, Marine Le Pen, assurant qu’il avait « vocation à réaliser l’unité nationale dont le pays a besoin ». Lundi matin, elle a ajouté sur RTL :
« Nous sommes presque en tête dans sept régions car en Normandie, nous sommes à égalité, séparés par 0,2, cela démontre une incroyable dynamique pour le FN. Il y a d’autres leçons à tirer, le très faible score de l’UMP (…) Nos objectifs c’est de gagner un maximum de régions. Les incroyables scores du FN c’est la révolte du peuple contre les élites. Les abstentionnistes peuvent encore s’inviter dans ce scrutin. »
Provence Alpes-Côte d’Azur. Le parti d’extrême droite emmené par Marion Maréchal-Le Pen atteint 40,55 %, alors que Les Républicains, conduits par Christian Estrosi, plafonnent à 26,48 % et que les socialistes s’effondrent à 16,59 %. Mme Maréchal-Le Pen a salué un « score absolument historique ».
Après avoir annoncé dans un premier temps son intention de se maintenir, Christophe Castaner, le candidat PS, a décidé de retirer sa liste pour le second tour afin d’empêcher une victoire du Front national, écoutant ainsi les consignes des instances nationales du parti.
M. Estrosi a considéré que sa liste était « la seule alternative possible à l’extrême droite ».
« Il faut créer les conditions pour que s’exprime un large rassemblement (…). Le score de Marion Maréchal-Le Pen fait peser sur notre région une des plus graves menaces de son histoire politique. »
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Nord-Pas-de-Calais-Picardie. Marine Le Pen arrive largement en tête au premier tour avec 40,64 % des suffrages, devant le candidat de la droite et du centre Xavier Bertrand (24,96 %). La liste socialiste dirigée par Pierre de Saintignon doit se contenter d’un maigre 18,12 % et se retire, conformément à la consigne donnée dimanche soir par le bureau national du PS.
M. Bertrand a fait une déclaration peu après 20 heures pour dire qu’il comprenait « la colère et le sentiment d’abandon des électeurs » du FN et s’est dit sûr que « le sursaut viendra de la région dans ses profondeurs » dimanche prochain. « Le visage [de la région] ne sera pas celui de Marine Le Pen. L’histoire retiendra que c’est ici, dans notre région, que son ascension a été stoppée », a lancé l’ancien ministre selon qui la liste de la droite est la « seule alternative possible contre l’extrême droite ». Lundi, M. Bertrand a déposé sa liste, devenant officiellement le seul adversaire de Marine Le Pen au deuxième tour.
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Alsace-Champagne-Ardennes-Lorraine. Le vice-président du FN, Florian Philippot, est arrivé dimanche largement en tête avec 36,06 % des voix, devant Philippe Richert (LR-UDI-MoDem), crédité de 25,83 % des voix, et devant le PS Jean-Pierre Masseret à 16,11 %, qui a annoncé qu’il se maintiendrait malgré les consignes de son parti.
Bourgogne-Franche-Comté. Le Front national réalise un bien meilleur score qu’attendu : avec 31,48 % des voix, la candidate FN Sophie Montel arrive nettement en tête. François Sauvadet, le candidat des Républicains qui faisait la course en tête dans les sondages, perd huit points par rapport aux projections et recueille 24 % des voix. La sortante socialiste Marie-Guite Dufay obtient 22,99 % des votes.
Centre-Val de Loire. La liste du frontiste Philippe Loiseau arrive en première position avec 30,49 % des voix, devant celle de Philippe Vigier (LR-UDI-MoDem), qui recueille 26,25 % des suffrages. Le socialiste François Bonneau est pour sa part à 24,31 %, devant la liste écologiste de Charles Fournier (6,6 %).
Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées. Le candidat Front national Louis Aliot arrive en tête avec 31,83 % des voix, devant Carole Delga (PS) qui réalise 24,41 % et Dominique Reynié (LR) qui enregistre un score de 18,84 %.
En Ile-de-France, Valérie Pécresse devant Claude Bartolone. L’ancienne ministre Valérie Pécresse, qui conduit la liste de la droite et du centre obtient 30,51 % des voix au premier tour, devant le président de l’Assemblée nationale, le socialiste Claude Bartolone (25,19 %). Le Front national est à 18,41 %, les écologistes à 8,03 %, le Front de gauche à 6,63 % et Debout la France à 6,57 %.
« Notre liste est la seule capable de faire échouer le PS. L’alternance est à portée de la main », s’est réjouie Mme Pécresse.
« Ce soir, la gauche est en tête en Ile-de-France avec un total à 40 % soit une dizaine de points de plus que la liste d’union LR-UDI », a quant à lui réagi M. Bartolone, qui « en appelle au peuple de gauche » car « pas une seule voix de gauche ne doit manquer dimanche prochain ».
Auvergne-Rhône-Alpes. Le secrétaire général de LR, Laurent Wauquiez, recueille 31 % des voix, devant le candidat FN Christophe Boudot (25,52 %) et le candidat PS Jean-Jacques Queyranne (23,93 %).
Pays de la Loire. La liste de la droite et du centre conduite par Bruno Retailleau est loin devant avec 33,49 % des suffrages exprimés. Le socialiste Christophe Clergeau arrive deuxième avec 25,75 %, devant la liste FN de Pascal Gannat (21,35 %).
Normandie. L’ancien ministre de la défense Hervé Morin (LR-UDI-Modem) arrive de justesse en tête avec 27,91 % des voix devant le frontiste Nicolas Bay (27,71 %) et le socialiste Nicolas Mayer-Rossignol (23,52 %).
Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes. La liste PS-PRG d’Alain Rousset arrive en tête dans la région avec 30,39 % des voix, devant la liste de droite et du centre de Virginie Calmels (27,19 %) et celle du FN de Jacques Colombier (23,23 %), selon les résultats définitifs.
Bretagne. Avec 34,92 % des voix selon des résultats définitifs, le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian arrive largement en tête du scrutin en Bretagne devant Marc Le Fur (LR) qui obtient 23,46 %. Bien que n’ayant quasiment pas fait campagne, il se voit en très bonne position pour le second tour.
Autre motif de satisfaction : les 18,17 % obtenus par le Front national et son candidat, Gilles Penelle, un des plus faibles scores du parti d’extrême droite. « La Bretagne de la confiance c’est celle qui refuse le repli sur soi et le recroquevillement, celle qui rejette l’intolérance et le sectarisme », a déclaré sur un ton grave Jean-Yves Le Drian. Le régionaliste Christian Troadec obtient par ailleurs 6,71 % des voix et l’écologiste René Louail 6,7 %.
Corse. La liste divers gauche conduite par le président sortant du conseil exécutif, Paul Giacobbi, devance de peu la liste nationaliste du maire de Bastia, Gilles Simeoni, avec 18,42 % des voix contre 17,62 %.
A droite, José Rossi obtient 13,17 % des voix et se place devant Camille de Rocca Serra, président de l’assemblée de Corse de 2004 à 2010, qui a obtenu 12,7 %. Les listes du candidat du Front national, Christophe Canioni (10,58 %), et du régionaliste Jean-Guy Talamoni (7,72 %) sont également qualifiées pour le second tour.
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Nicolas Sarkozy refuse « toute fusion et tout retrait de liste » au second tour
Le scénario tant redouté par Nicolas Sarkozy s’est donc bien produit : son parti, Les Républicains (LR), est devancé par le Front national lors du premier tour des élections régionales. Pour autant, le président des Républicains a appelé les électeurs à soutenir les listes de son parti au second tour et refusé toute idée de front républicain contre le Front national, arrivé en tête dans six régions.
Promis à une large victoire ces derniers mois, LR fait les frais de la performance du FN, qui bénéficie d’un climat porteur depuis les attentats du 13 novembre. Les dirigeants de droite se montraient sonnés à l’annonce des premières estimations. « Le FN est si haut en Nord-Pas-de-Calais–Picardie, en Provence-Alpes-Côte d’Azur et en Alsace que je ne vois pas comment on pourra l’empêcher de remporter ces régions au second tour », confie, dépité, un dirigeant du parti de M. Sarkozy.
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Après les résultats, le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis a annoncé un retrait des listes en Nord-Pas de-Calais-Picardie et en Provence-Alpes-Côte d’Azur, appelant à un « barrage républicain », synonyme de « sacrifice » pour les socialistes qui, pendant cinq ans, ne siégeront pas dans ces régions.
Les socialistes appellent par ailleurs à regarder le score sur l’ensemble de la gauche, en additionnant les voix du PS, des écologistes et du Front de gauche. Ainsi, le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, a souligné que le total des voix de gauche « doit dépasser les 36 % », ce qui en « fait le premier parti de France ». « On a trop souffert des divisions. On n’aurait pas dû laisser partir des listes divisées là où on savait qu’il y avait un risque très clair de voir le FN arriver en tête. Je le répète, j’appelle au rassemblement de toutes les forces de gauche et des écologistes », a-t-il insisté. Emmanuelle Cosse, la secrétaire nationale d’Europe Ecologie-Les Verts, a déclaré que son parti souhaitait « travailler à la fusion des listes de gauche et des écologistes au second tour », afin d’« avoir des régions demain qui soient dirigées par cette majorité-là ».
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Une abstention à 50,2 %
Ces dernières élections intermédiaires du quinquennat de François Hollande, qui étaient les premières dans le cadre des treize régions – contre 22 précédemment – issues de la réforme territoriale, sont également les premières depuis les attentats du 13 novembre. Selon des chiffres quasi-définitifs du ministère de l’intérieur, l’abstention s’élève à 50,2 %. Lors de la dernière édition des élections régionales, en 2010, l’abstention nationale s’était élevée à 53,6 %.
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