Ce qui n’était au départ qu’un simple signalement de l’ambassade de France à Dakar a débouché sur un vaste coup de filet. En mai dernier, la représentation diplomatique avait alerté sur la présentation de faux documents par des demandeurs de visas Schengen. La Division nationale de lutte contre le trafic des migrants et des pratiques assimilées (DNLT) a aussitôt ouvert une enquête, qui vient de mettre en lumière un réseau structuré impliquant deux agences de voyage et plusieurs de leurs employés.
Six suspects arrêtés, deux agences pointées du doigt
Selon les premiers résultats de l’enquête, révélés par Libération, six personnes ont déjà été interpellées. Deux agences de voyage, « Europe Voyage » et « Keur Serigne Abdou Anne », se retrouvent dans le viseur des enquêteurs. Leur point commun : le recours au même faussaire, connu sous le pseudonyme de « Docteur Sambou », aujourd’hui en cavale.
La première arrestation a concerné M. C. Keïta, surpris devant le siège de VSF Global Voyage à Dakar. Il aurait initié depuis la Guinée une procédure de demande de visa, qui s’est poursuivie au Sénégal avec la complicité présumée de K. Aïdara, gérante de l’agence Europe Voyage.
Un réseau bien organisé
D’après l’enquête, K. Aïdara aurait fourni à M. C. Keïta de faux documents (relevé bancaire, attestation de travail, congé fictif…). Interrogée, elle a déclaré avoir agi sur instructions de ses employeurs, Ma. Mbengue et Mo. Fall. Son audition a permis d’identifier d’autres maillons de la chaîne : Cissokho, comptable de l’agence, et K. Bah, qui réceptionnait via Wave la majeure partie des fonds des candidats au visa.
Parallèlement, trois individus – F. Bâ, A. Bèye et El H. B. Diop – ont été arrêtés à l’aéroport international Blaise-Diagne (AIBD) alors qu’ils tentaient de rejoindre la Turquie avec de faux documents. Ils ont formellement accusé A. Guèye, gérante de l’agence Keur Serigne Abdou Anne. Interpellée à son tour, cette dernière a tenté de rejeter la responsabilité sur son employeur, un certain Baldé, établi aux États-Unis.
La traque de « Docteur Sambou »
Au centre du dispositif, un nom intrigue particulièrement : celui de « Docteur Sambou », présenté comme le fournisseur attitré des faux documents utilisés par les deux agences. Activement recherché, il constitue désormais la principale cible de la DNLT.
L’enquête se poursuit afin d’identifier l’ensemble du réseau et de mettre un terme à ce trafic de documents frauduleux, qui fragilise la crédibilité des procédures de demande de visa et alimente les circuits clandestins de migration.