Les terroristes de Paris étaient-ils d’office drogués avant d’attaquer?

564c2a613570bccfaf1edeffDes témoins, qui ont eu le malheur de voir de près le visage des terroristes, notamment au Bataclan, on a entendu dire : « Ce qui m’a frappé, c’est l’air calme et détendu avec lequel ils nous tiraient dessus. » Comme s’ils étaient dans un état second, sous l’emprise d’une drogue qui les aurait « aidés » à commettre leur massacre.

Mardi, lors de la perquisition effectuée dans la chambre de l’hôtel où ont séjourné avant les attentats Salah Abdeslam et ses complices, des seringues ont été trouvées. Vraisemblablement utilisées pour fabriquer les explosifs, elles pourraient aussi l’avoir été par les terroristes pour se droguer.

En ce qui concerne Seifeddine Rezgui, l’homme de 23 ans qui, en riant, avait tué 39 personnes et en avait blessé autant, en juin dernier, sur une plage tunisienne, la réponse ne fait plus aucun doute. L’autopsie, réalisée après le massacre, a bien révélé que le tueur était sous l’emprise d’une drogue. La fénéthylline, en l’occurrence, vendue sous le nom de Captagon.

Une impression de toute-puissance

Très prisé des combattants de Daech, le Captagon est un stimulant de la famille des amphétamines. Apparue en 1961, la substance était à l’origine prescrite en cas d’hyperactivité, de dépression et de trouble du sommeil chronique (narcolepsie). Pris à des doses modérées, le médicament stimule en effet la production de dopamine et améliore la concentration. Dans les années 60 et 70, les cyclistes y avaient régulièrement recours comme produit dopant. Il faudra attendre 1986 pour que la fénéthylline soit reprise sur la liste des substances stupéfiantes, par l’Organisation mondiale de la santé.

Quels sont donc les effets engendrés par cette drogue ? « Comme toutes les autres amphétamines, cette drogue entraîne une résistance à la fatigue, une vigilance accrue et une perte de jugement », expliquait récemment à « Science et Avenir » le Pr Jean-Pol Tassin, neurobiologiste de l’Inserm et spécialiste des addictions. « Elle donne l’impression à celui qui la consomme d’être tout-puissant, d’être le ‘roi du monde’ en quelque sorte. »

En plus d’agir sur le cerveau, notamment via la libération de noradrénaline, qui augmente la vigilance et réduit la sensation de fatigue, et de dopamine, qui agit sur le circuit de la récompense, responsable de la sensation de plaisir, la drogue, en augmentant la libération de glucose, favorise la prise de masse musculaire.

La pilule de l’horreur qui fait leur bonheur

Présenté comme une véritable « potion magique », qui procure courage et force, le Captagon donne des ailes aux combattants qui, en pleine euphorie, se sentent invincibles, totalement étrangers à tout sentiment de peur ou sensation de douleur. « Ça donne la pêche, tu te mets à combattre sans te fatiguer. Tu marches droit devant toi. Tu ne connais plus la peur. Les combattants l’utilisent pour veiller, pour contrôler leurs nerfs et pour améliorer leurs performances sexuelles », expliquait un trafiquant dans un reportage diffusé par Arte.

Car la petite pilule blanche fait effectivement l’objet d’un juteux trafic. C’est au début des années 2000 que sa production explose, principalement en Turquie et en Syrie, où cette pilule de l’horreur fait le bonheur des trafiquants à destination des pays du Golfe, dans un premier temps, et depuis 2011, des djihadistes de Daech, du Front al-Nosra et des soldats de l’armée syrienne libre.

De fabrication simple et bon marché, la drogue de Daech, qui est acheminée par bateau ou voiture de la Syrie vers le Liban et la Jordanie est vendue entre 5 et 20 dollars la pilule, quand elle n’est pas échangée contre des armes.Laurence Dardenne.

Lalibre