Elle n’était pas à l’ordre du jour, mais la question des relations entre Bruxelles et la Pologne va s’inviter au sommet de l’Union européenne qui s’ouvre ce jeudi.
En amont du sommet européen, le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki s’est dit ouvert au dialogue
Si des sujets comme la pandémie de Covid-19 et les prix de l’énergie figurent à l’ordre du jour, il fait peu de doutes que la question des relations entre Bruxelles et la Pologne va s’inviter à ce sommet de l’Union européenne qui s’ouvre ce jeudi (21.10) pour deux jours.
Pas plus tard que mardi (19.10), le bras de fer entre la Pologne et Bruxelles a été porté devant les eurodéputés et les caméras du Parlement européen à Strasbourg. Invité à s’exprimer sur la décision du tribunal constitutionnel polonais, proche du pouvoir, de placer le droit national de la Pologne au dessus du droit européen, le Premier ministre Mateusz Morawiecki a dénoncé un « chantage » de la part de la Commission européenne, tout en maintenant que son pays « est et restera membre ce l’UE ».
Pour le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki, la justice européenne manque de transparence
Le gouvernement conservateur et nationaliste polonais arrivé au pouvoir en 2015 dénonce une justice européenne partisane et échappant au contrôle démocratique, alors que la Pologne est dans le viseur de Bruxelles sur plusieurs sujets, comme les droits des LGBTQ ou encore l’indépendance de la justice.
Les moyens de pression
La Commission étudie actuellement ses options pour protéger à ses yeux le respect de l’Etat de droit de l’Union.
« Porter atteinte à l’Etat de droit ou à la primauté du droit européen met en danger notre démocratie européenne. Nous ne pouvons pas et nous ne laisserons pas cela se produire », a averti Urusula von der Leyen. La présidente de la Commission européenne n’a cependant pas encore annoncé de mesures concrètes.
Les aides financières versées par l’UE à la Pologne sont l’un des leviers possibles. La Pologne fait notamment partie des premiers bénéficiaires de l’aide exceptionnelle qui doit être versée dans le cadre du plan de relance économique européen face à la pandémie de Covid-19. Varsovie attend le versement de plusieurs dizaines de milliards d’euros de subventions. Pour le moment, Bruxelles n’a pas encore débloqué cet argent et pourrait geler ces aides.
Ingratitude de la Pologne ?
La voie juridique est une autre option, mais porter l’affaire devant la Cour européenne de justice pourrait entraîner une procédure de plusieurs années.
Les pays de l’ouest de l’Europe sont globalement opposés au coup de force de la Pologne. Aussi certains pays du nord, appelés les « frugaux », comprenant notamment les Pays-Bas, la Suède ou encore le Danemark, voient d’un mauvais œil une attitude jugée ingrate de la Pologne, estimant que le pays profite pleinement des aides européennes pour soutenir sa croissance.
En face, Varsovie peut compter sur les alliés traditionnels comme la République tchèque et la Hongrie, cette dernière étant aussi régulièrement dans le collimateur de Bruxelles pour ne pas respecter un certain nombre de droits et de libertés pourtant garantis par le droit communautaire.
La migration, autre sujet du sommet
La Pologne sera également concernée par un autre sujet à l’ordre du jour, à savoir la migration.
Le pays est aux avant-postes de la crise migratoire déclenchée par la Biélorussie et tente de stopper l’afflux de migrants en provenance de son voisin.
De nombreux migrants racontent avoir été refoulés vers la Biélorussie à la frontière polonaise
Minsk est accusée par l’UE et de nombreuses ONG d’encourager et d’aider des migrants présents sur son territoire à se rendre en Pologne, mais aussi en Lituanie et Lettonie, trois pays qui ont une frontière commune avec la Biélorussie. Le régime d’Alexandre Loukachenko se vengerait ainsi des sanctions européennes prises à son encontre. Il s’agit surtout de personnes venues du Moyen-Orient et d’Afrique.
Quelque 6.000 soldats polonais ont ainsi été déployés par Varsovie le long de sa frontière avec la Biélorussie. La construction d’un mur est également envisagée. De nombreuses ONG dénoncent par ailleurs des refoulements violents et illégaux de migrants.
A la frontière polonaise, la police allemande se dit débordée par l’afflux de migrants
L’Allemagne, qui sera encore représentée par la chancelière sortante Angela Merkel lors de ce sommet de l’UE, est également en première ligne sur cette question. Après avoir traversé la Pologne, de nombreux migrants se pressent en effet à la frontière allemande, où la police locale se dit débordée.
Pour renforcer les contrôles, Berlin a proposé ce mardi (19.10) à Varsovie de renforcer des patrouilles conjointes.