La garde à vue de Nicolas Sarkozy a repris, mercredi matin, dans le cadre de l’enquête sur le présumé financement libyen de sa campagne électorale de 2007. L’ancien président avait pu regagner son domicile mardi soir.
« Il est possible qu’une garde à vue soit levée quand cela concerne des hautes personnalités. On suspend alors la garde à vue. Elle reprend ce matin pour Nicolas Sarkozy », explique l’envoyé spécial de France 24, Karim Hakiki. « Cela est déjà arrivé pour Claude Guéant. Il lui a été permis de rentrer chez lui pour se reposer et de revenir le lendemain matin. La procédure pénale le permet, mais cela est un cas exceptionnel. »
Selon Mediapart et Le Monde, qui ont révélé l’information, c’est la première fois que l’ancien chef de l’État est entendu dans le cadre de cette affaire par les policiers de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF).
Brice Hortefeux, proche de Nicolas Sarkozy, est de son côté entendu en audition libre depuis mardi matin, selon une source proche du dossier.
LES EXPLICATIONS DE NOTRE JOURNALISTE
Cette nouvelle étape marque un coup d’accélérateur dans ce dossier tentaculaire, instruit par des magistrats du pôle financier. Ils enquêtent depuis avril 2013 sur des accusations de financement de la campagne présidentielle 2007 de Nicolas Sarkozy par la Libye de l’ex-dignitaire Mouammar Kadhafi.
Ces accusations ont été formulées par l’intermédiaire franco-libanais Ziad Takieddine et d’ex-responsables libyens. L’ancien chef de l’État français a toujours rejeté ces accusations.
Revirement après les déclarations de Ziad Takieddine
Dans ce Les magistrats s’interrogent sur le virement de 500 000 euros perçu par Claude Guéant en mars 2008, en provenance d’une société d’un avocat malaisien. Il a toujours expliqué qu’il s’agissait du fruit de la vente de deux tableaux.
L’enquête avait connu un revirement en novembre 2016 avec les déclarations à Mediapart de Ziad Takieddine, qui a assuré avoir remis à Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur et à son directeur de cabinet Claude Guéant, trois valises contenant 5 millions d’euros en provenance du régime Kadhafi, entre novembre 2006 et début 2007.
L’ANALYSE DE DELPHINE MEILLET, AVOCATE AU BARREAU DE PARIS
Les juges s’interrogent également sur la vente suspecte en 2009 d’une villa située à Mougins (Alpes-Maritimes), pour environ 10 millions d’euros, à un fonds libyen géré par Bachir Saleh, ancien argentier du régime. Les enquêteurs soupçonnent l’homme d’affaires Alexandre Djouhri d’être le véritable propriétaire et vendeur de ce bien et de s’être entendu avec Bachir Saleh pour fixer un prix d’achat « très surévalué ».
Importante circulation d’argent en espèces durant la campagne de 2007
Actuellement en exil, Bachir Saleh, que la justice française souhaite interroger dans le cadre de cette affaire, a été blessé par balles fin février en Afrique du Sud. Il est visé par un mandat d’arrêt international.
Quant à Alexandre Djouhri, il a été arrêté en janvier à Londres en vertu d’un mandat d’arrêt européen émis par la justice française. Il avait été placé en détention provisoire, puis libéré après le paiement d’une caution avant d’être une nouvelle fois incarcéré fin février. Souffrant de problèmes cardiaques, il est hospitalisé depuis une dizaine de jours à Londres, selon une source proche de l’enquête.
Autres éléments troublants mis en avant dans un rapport de l’OCLCIFF de septembre 2017 : une importante circulation d’argent en espèces dans l’entourage de Nicolas Sarkozy lors de sa campagne de 2007 et l’usage très régulier d’argent en liquide par Claude Guéant.
Interrogés par les enquêteurs, Éric Woerth, trésorier de la campagne présidentielle, et son adjoint chargé de la distribution des enveloppes, Vincent Talvas, ont répondu que l’argent provenait de dons anonymes. Une justification contestée au cours d’autres auditions, dont celle de la personne chargée du courrier reçu à l’UMP durant cette campagne présidentielle, qui a déclaré n’avoir « jamais vu de courrier arrivant qui contenait des espèces ».
Avec AFP et Reuters