La France a accueilli il y a quelques jours, pour la première fois en trente-trois ans, le XIXe Sommet de la Francophonie. Inscrit comme l’un des temps forts internationaux de l’année 2024 en France, cet événement majeur, qui s’est déroulé en partie à la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts, en présence de plus d’une centaine de représentants d’États et de gouvernements, a abordé des enjeux politiques, économiques, numériques et culturels avec un thème central « Créer, innover et entreprendre en français ».
Plusieurs défis ont été abordés : Linguistiques : Avec une population francophone qui devrait passer de 321 millions à 715 millions d’ici 2050, il est impératif de renforcer l’enseignement du français et de soutenir son apprentissage. Géopolitiques : Dans un monde de plus en plus fragmenté, la Francophonie doit devenir un espace de dialogue puissant, présent sur tous les continents. Numérique : Alors que l’intelligence artificielle progresse, il est essentiel que l’espace numérique reflète la diversité linguistique et culturelle. Économiques : Les États francophones doivent renforcer leurs échanges commerciaux et explorer de meilleures perspectives d’emploi, favorisant ainsi des liens économiques solides.
Sur les 88 États et gouvernements membres de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), plus d’une cinquantaine de chefs d’États (l’absence du président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a été très remarquée car c’est la première fois qu’un président sénégalais rate un sommet de la Francophonie) ont été accueillis par le président Macron qui voit dans la Francophonie « un espace de médiation », « un espace de dialogue pour régler des différends politiques comme c’est le cas entre la République démocratique du Congo et le Rwanda ». De nombreux dirigeants africains étaient d’ailleurs présents provenant du Bénin, du Tchad, de Centrafrique, du Rwanda ou de RDC. Trois pays sahéliens, le Mali, le Burkina Faso et le Niger, avec lesquels la France entretient des relations houleuses depuis qu’ils ont connu des coups d’État ces dernières années n’ont pas été invités, contrairement à la Guinée, où une junte est au pouvoir depuis trois ans après un putsch, mais dont la suspension à l’OIF a été levée fin septembre. Deux nouveaux pays et trois régions font leur entrée au sein de l’OIF. C’est le cas notamment de l’Angola, qui devient observateur, tandis que le Ghana de son côté change de statut et devient membre à part entière.
Selon le CERMF (Centre d’étude et de réflexion sur le Monde francophone), en se basant essentiellement sur les statistiques démographiques détaillées publiées en juillet dernier par l’ONU, la population du monde francophone peut être estimée à 583,7 millions au 1er juillet 2024, après avoir dépassé l’espace hispanophone, et plus récemment l’Union européenne dans ses anciennes frontières, incluant le Royaume-Uni. Une progression essentiellement due à l’Afrique francophone, dont l’émergence démographique et économique pourrait faire passer à 715 millions d’ici 2050 le nombre de locuteurs français sur les cinq continents, un vaste espace, qui s’étend sur près de 16,3 millions de km2, soit près de quatre fois l’Union européenne tout entière. Les cinq premiers pays francophones sont aujourd’hui la République démocratique du Congo (109,3 millions d’habitants), la France (69,2 millions, territoires ultramarins inclus, tous statuts confondus), l’Algérie (46,8), le Maroc (38,7) et Madagascar (32,0). Vient ensuite la Côte d’Ivoire, en sixième position (31,9 millions). Avec une croissance démographique estimée à 2,16 % en 2024, et un taux de fécondité global de 4,01 enfants par femme, le monde francophone constitue l’espace linguistique le plus dynamique au monde, devant l’espace arabophone, dont la croissance prévue s’élève à 1,81 % et dont la population est estimée à 497,6 millions d’habitants mi-2024.
Lors de son discours, le Président français Emmanuel Macron a salué une langue de « résistance et de combat, en constante réinvention. » « La Francophonie est un espace d’influence diplomatique qui nous permet d’embrasser les enjeux du siècle », a-t-il déclaré à l’ouverture du sommet. « Elle est un lieu où nous pouvons ensemble porter une diplomatie qui défend la souveraineté et l’intégrité territoriale partout à travers la planète. Nous sommes sur tous les continents avec plus de 320 millions de locuteurs et bientôt la troisième langue parlée au monde. », a-t-il dit devant les chefs d’État et de gouvernement. Le Français est un « formidable levier d’opportunités, je le dis pour tous nos jeunes, tous ceux qui s’orientent vers le commerce, ne pensez pas qu’anglais », a assené le Président.
La langue étant le principal vecteur d’influence culturelle, avec d’importantes répercussions économiques et géopolitiques, la France doit donc investir prioritairement dans son espace linguistique afin d’amplifier la progression de la langue française dans le monde, « aussi bien au bénéfice de ses propres intérêts que de ceux de l’ensemble des pays et peuples francophones du monde« .