Vladimir Fédorovski, écrivain franco-russe, affirme que la Russie saura parfaitement accueillir les Bleus durant ce Mondial.
Diplomate à l’ambassade d’URSS à Paris à la fin des années 1980, Vladimir Fédorovski est devenu un écrivain à succès, auteur d’une quarantaine d’ouvrages sur l’histoire de la Russie. Son prochain livre, «Au coeur du Kremlin»*, paraîtra au printemps. « Sans sympathie particulière pour Poutine », assure-t-il, Fédorovski, 67 ans, analyse les enjeux de la Coupe du Monde pour le maître de la Russie.
Pourquoi le tirage au sort est-il organisé au Kremlin ?
Vladimir Fédorovski. Parce que cela ne pouvait se passer ailleurs. Le Kremlin, c’est le coeur du pouvoir. Cet événement sera le symbole de la Russie éternelle face au monde. Il s’agira aussi d’un moment fort de la campagne de Vladimir Poutine en vue de la présidentielle de mars. Les Etats-Unis et une partie de l’Occident ont tenté d’isoler la Russie, notamment après la crise ukrainienne, en présentant Poutine comme l’incarnation du mal absolu. Cette stratégie de diabolisation a échoué et la Coupe du monde de football est, d’une certaine façon, le symbole de cet échec.
Comment Poutine peut-il utiliser la Coupe du monde ?
Comme une vitrine où il sera possible d’exposer les richesses culturelles de la Russie. La découverte de Saint-Pétersbourg pour les supporteurs français sera un choc émotionnel, comme une première nuit d’amour… Moscou est une ville très verte, malgré ses embouteillages. Enfin, le choix de Kazan contient un message politique fort. Cette ville, centre religieux musulman de la Russie, donne l’image d’une coexistence pacifique avec l’islam.

Quel rapport personnel Poutine entretient-il avec le sport ?
Il n’a pas d’affinité particulière avec le football. Si ce n’est qu’il a poussé de nombreux oligarques à racheter des clubs russes. En revanche, le judo l’a discipliné et sauvé d’une adolescence de petit caïd. Toute sa carrière politique est imprégnée par l’essence de ce sport : utiliser à son avantage la force de l’adversaire. D’ailleurs, j’oserais faire un pronostic : après sa réélection en mars, Poutine se retirera officiellement du Kremlin d’ici deux ou trois ans. Et contrôlera la Russie depuis un poste de président de la Fédération russe de judo. Ce n’est pas une plaisanterie, vous verrez…
Quelle est l’image de la France à Moscou en ce moment ?
Elle a toujours été bonne. Je vous prédis d’ailleurs que les Bleus seront très bien soutenus par les Russes lors de cette Coupe du monde. Il existe en effet une longue histoire commune et une certaine tendresse entre nos deux pays, en tout cas vu de Moscou.
* «Au coeur du Kremlin : Des tsars rouges à Poutine», Ed. Stock, 342 pages, 20 euros.