A Malte, un sommet Europe-Afrique consacré au phénomène migratoire, a réuni les chefs d’Etat et de gouvernement d’une cinquantaine de pays des deux continents. Après une année marquée par de nouveaux naufrages meurtriers en Méditerranée, l’objectif affiché de la Commission européenne est d’établir un plan d’action avec les pays d’origine et de transit des migrants africains pour empêcher que les drames se répètent, et donc tarir les routes de l’exil vers l’Europe de dizaines de milliers d’Africains.
Les dirigeants européens ont vingt-quatre heures pour convaincre. Vingt-quatre heures dans le périmètre fortifié de la péninsule de La Valette pour persuader leurs homologues africains que leur plan d’action est le bon.
Selon le document préparatoire consulté par RFI, cinq grands chantiers sont sur la table :
- D’abord l’investissement en Afrique pour offrir des emplois à la jeunesse, soutenir les agricultures locales et, par exemple, inciter les diasporas africaines à investir dans leur pays d’origine.
- Deuxièmement, l’ouverture de voies d’accès légales plus faciles vers l’Europe. Mais cela ne concerne, en l’état, que les étudiants, les chercheurs, les employés très qualifiés ou les artistes.
- Troisièmement, l’assistance des pays africains qui accueillent déjà de nombreux réfugiés sur leur sol.
- Quatrièmement, la lutte contre les trafiquants.
- Et cinquièmement, la mise en place d’un cadre légal et d’un accompagnement pour le renvoi dans leur pays des déboutés du droit d’asile.
Jusqu’ici, beaucoup de pays africains ont jugé que les propositions européennes étaient problématiques, et notamment qu’ils n’avaient pas les moyens de les appliquer. La Commission européenne entend donc annoncer la création d’un « fonds fiduciaire » pour financer ce plan d’action. On parle pour l’instant d’un montant de 1,8 milliard d’euros.
Comment coopérer avec des Etats autoritaires ?
Si l’accent est mis sur le développement des pays de départ pour encourager les jeunes à rester au pays, d’importantes questions restent en suspens, notamment lorsqu’il s’agit de la coopération avec des pays autoritaires.
Les problèmes pourraient se multiplier dès lors qu’il faudrait former les gardes-frontières dela très autoritaire Erythrée, renforcer les capacités de la justice soudanaise, dont le président est pourtant inculpé par la CPI, ou bien coopérer avec la marine libyenne, dont le gouvernement reconnu ne contrôle qu’une faible partie du territoire…
Tous ces dilemmes sont sur la table du sommet de Malte. Car il s’agit ici pour les dirigeants européens d’établir un « partenariat » enfin efficace avec les pays africains concernés par la crise migratoire. Tout en respectant, disent-ils, les droits des réfugiés.
Discussions au cas par cas
Conscients de ces difficultés, les diplomates européens entendent donc discuter au cas par cas avec les pays africains. Un projet de centre d’assistance et d’information des migrants à Agadez, au Niger, semble d’ores et déjà acquis. D’autres projets-pilotes devraient être également annoncés au terme de ce sommet.
Il reste que les ONG sont vent debout contre ce qu’elles appellent « l’externalisation » de la répression, sous couvert d’aide au développement. Car c’est précisément la répression politique, par exemple, qui a poussé plusieurs milliers d’Erythréens à gagner l’Europe par la mer en 2015. rfi