Cet été, BFMTV.com revient sur ces grands escrocs qui ont marqué leur époque, avec Pierre Lunel, auteur d’un livre sur le sujet. Aujourd’hui, l’histoire de Jean-Claude Romand, qui a menti toute sa vie avant d’assassiner sa famille.
Un homme, brillant médecin aux yeux de son entourage, tue un jour sa femme et ses enfants de sang-froid. Il se rend dans la maison familiale, et tue également ses parents. Il revient chez lui, avale des barbituriques périmés, met le feu à sa chambre. Il attend la mort. Il sera sauvé par des pompiers.
Jean-Claude Romand semble avoir voulu éliminer tous les témoins de son étrange vie, et de son incroyable imposture, qui aura duré près de vingt ans. A l’époque de ces meurtres, nous sommes en 1993. Retour en arrière.
Une vie entière bâtie sur le mensonge
Jean-Claude Romand, jeune homme rêveur et taciturne, a une propension à la solitude. Il se lance dans des études de médecine après une enfance lisse et sans histoire. Il tombe amoureux de Florence, une jeune femme qu’il connaît depuis l’enfance. Elle deviendra son épouse. Les jours passent. L’examen de deuxième année de médecine approche. Ce jour-là, Jean-Claude Romand entend son réveil, le regarde, mais ne se lève pas. Pourquoi? Nul ne le sait véritablement, mais une chose est sûre, sa vie bascule ce jour-là.
Le jeune homme décide de faire croire à son entourage qu’il a validé sa deuxième année. Sept ans de suite, il se réinscrit, et occupe ses semaines à réviser. Sept ans de suite, il fait croire qu’il réussit brillamment ses études. En réalité, il ne passera plus un seul examen.
Des escroqueries financières en série
Le cursus terminé, le mensonge continue. Le jeune homme s’invente un poste prestigieux de chercheur à Genève, au sein de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Chaque matin, il se lève, prend sa voiture, s’arrête des heures sur des aires en bord de route ou dans des bibliothèques universitaires, et revient le soir raconter à sa famille une journée qui n’a jamais existé.
L’imposture durera de la sorte près de dix-huit ans. Comment fait-il pour s’en sortir financièrement? Jean-Claude Romand a de l’imagination. Il fait croire à son entourage qu’il a des contacts bancaires en Suisse, qui lui offrent de beaux placements. L’homme se fait prêter de grosses sommes d’argent, dans le but de les faire fructifier en Suisse. En réalité, elles ne serviront qu’à financer son train de vie et à donner l’apparence d’une famille aisée.
Un quintuple meurtre et une tentative de suicide
Jusqu’au jour où le compte en banque s’assèche. Sa femme finit-elle par se douter de quelque chose? Est-elle proche de découvrir la vérité? Jean-Claude Romand bascule: il fracasse le crâne de son épouse pendant son sommeil, à coups de rouleau à pâtisserie. Quelques heures plus tard, il monte dans la chambre de ses enfants, Caroline, 7 ans, et Antoine, 5 ans, et vide sur eux le chargeur d’un 22 long rifle. Il prend sa voiture, retrouve son amante Chantal à Paris. Il tente de l’assassiner en forêt mais n’y parvient pas. Il lui fait promettre de ne rien dire, et part vers le Jura, chez ses parents. La carabine est rechargée.
Sa mère, son père et leur chien seront retrouvés morts. Rien ne semble devoir survivre à Jean-Claude Romand. De retour chez lui, auprès des cadavres de sa femme et de ses enfants, il décide de mettre fin à l’engrenage de ses mensonges, qui l’ont conduit à ce massacre. Au petit matin, il craque une allumette, et met le feu à sa maison. Des pompiers aperçoivent la fumée et réussissent à l’extraire vivant de la fournaise.
Prison à perpétuité
Le 2 juillet 1996, Jean-Claude Romand est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, avec une période de sûreté de 22 ans. Aujourd’hui, il purge sa peine à la maison centrale de Saint-Maur, dans l’Indre, où il s’occupe de la bibliothèque. Il devrait bientôt en sortir, et redevenir libre.
Son histoire a notamment inspiré le roman L’Adversaire, d’Emmanuel Carrère, et un film du même nom, avec Daniel Auteuil dans son rôle.
« Les plus grands escrocs de l’Histoire » de Pierre Lunel, Ed. First, 317 pages, 17,95 euros.