Un étudiant lance Kiron. But: permettre aux jeunes demandeurs d’asile d’étudier sans attendre une autorisation.
Comment poursuivre des études quand on est requérant d’asile? «Au cours des deux premières années, c’est impossible», explique Markus Kressler, étudiant allemand en psychologie et fondateur de la première université pour sans-papiers. «C’est dommage de laisser des jeunes ne rien faire alors qu’ils veulent étudier. Ils risquent de vivre deux ou trois ans dans l’incertitude complète, sans aucune perspective.»
Parmi les 800’000 à un million de réfugiés attendus cette année en Allemagne, des milliers de jeunes sont prêts à reprendre le chemin de l’université. «Et il y a beaucoup de jeunes talents», insiste-t-il. «C’est un potentiel énorme que nous ne devons pas gâcher.»
Course d’obstacles administratifs
Pour un demandeur d’asile, le chemin est long avant d’obtenir une place à l’université. Il faut des papiers d’identité en règle, un diplôme de fin d’études, savoir parler correctement l’allemand et bien sûr être reconnu comme demandeur d’asile. Difficile d’obtenir vite ces documents quand on vient d’un pays en guerre. L’idée est donc de contourner les obstacles administratifs. Pour s’immatriculer à l’Université Kiron, il n’y a pas besoin d’une carte d’identité ni de parler l’allemand. Les documents nécessaires peuvent être fournis dans les deux ans.
L’Université Kiron ouvre ses portes demain, jeudi 15 octobre, avec 1000 premiers étudiants. Ils suivront un «cours général» puis une spécialisation. Cinq matières seront enseignées: informatique, ingénierie, économie, architecture et études interculturelles. «Nous avons signé des partenariats avec les meilleures plates-formes de cours en ligne du monde», insiste son fondateur.
Harvard, Stanford ou Yale
Une partie des cours seront dispensés en anglais par de grandes universités à l’étranger (Harvard, Stanford ou Yale). Les étudiants pourront ensuite prétendre à une place dans l’une des quinze universités allemandes qui ont accepté une coopération. Pour peu, bien sûr, qu’ils aient réussi les examens et acquis un niveau correct d’allemand.
Pour les universités, la perspective de l’arrivée d’étudiants étrangers est une aubaine. «Les abandons sont nombreux dans les trois premières années. Les réfugiés pourront remplir les chaises vides», explique Markus Kressler. «C’est une situation win-win: les universités pourront prétendre à plus d’argent de l’Etat.»
Coût: 400 euros par an
Les coûts d’un étudiant ont été évalués à 400 euros par an (cours en ligne et mise à disposition d’un ordinateur portable avec connexion Internet). «Ces coûts, c’est 5% de ceux d’une université classique», souligne Markus Kressler. Les besoins annuels de Kiron sont évalués à 1,2 million d’euros. Mais à terme, l’Etat devrait financer ce projet. «Nous commençons par un crowdfunding (financement participatif). Dès que le gouvernement verra que ça fonctionne, nous obtiendrons des aides.» (24 heures)