«Immigration, stop ou encore?». La tribune de Sira Sylla

«La France doit rester généreuse en accueillant ceux dont la vie est menacée… En revanche, l’immigration économique est dépassée»

Regardons la question de l’immigration en face, sans surenchère ! Entre ceux qui veulent ériger des forteresses et ceux qui invitent les migrants à venir en France en leur offrant comme seule perspective des campements insalubres, il y a une autre voie ! L’immigration telle qu’elle s’est construite à la fin du XIXe siècle fut certainement une aubaine pour notre pays en ce qu’elle répondait à un double besoin : trouver une main-d’œuvre bon marché et combler des déficits démographiques. Mais la France d’aujourd’hui n’est plus celle de 1963, époque où mon père, cadet de sa famille, a émigré pour trouver un travail afin d’espérer un avenir meilleur tout en soutenant ses proches restés au village, au Sénégal.

La France et le monde ont changé. J’approuve l’affirmation du président Sarkozy selon laquelle « l’immigration zéro  est un mythe dangereux ». La France doit rester généreuse en accueillant ceux dont la vie est menacée et cette contribution doit être la priorité. En revanche, l’immigration économique est dépassée. Changements de logiciel ! La jeunesse africaine la demande : fini la charité !

Pourquoi ces populations doivent venir en France exercer les métiers que certains de nos concitoyens ne veulent pas faire ? Cessons de voir les circulations venant d’Afrique comme des bataillons de personnes condamnées à combler une pénurie de main-d’œuvre dans des secteurs d’activité souvent pénibles et peu attractifs. Il y aurait des métiers pour ceux qui cherchent un avenir meilleur et d’autres pour les Français ? Et bien non ! Proposer des métiers en tension aux immigrés n’est pas la solution. Rester dans cette vision paternaliste et condescendante alimentant le fait que certains vivent sur un territoire où il n’y a pas de perspectives est une faute majeure. Cela contribue au pillage des forces vives des pays d’origine, freinant ainsi leur développement.

Révolution des mobilités. Avec 450 millions de jeunes à insérer sur le marché du travail d’ici à 2050, la clé pour l’Afrique c’est le développement et cela passe par une révolution des mobilités ; révolution que le président Macron s’attelle à construire depuis 2017.

Que ce soit dans les domaines de l’enseignement supérieur, de l’innovation ou encore de la culture, l’ensemble des acteurs doivent travailler à renforcer les coopérations, mieux organiser les mobilités favorisant les échanges, accompagner la création de formations techniques répondant aux besoins économiques des pays. Une mobilité de liberté et non de nécessité, dans les deux sens et pour le partage des compétences, parce que nous avons aussi besoin de l’expertise africaine !

La prochaine présidence française de l’Union européenne sera l’occasion de rebâtir un traité Afrique-Europe partant de ce qui est engagé en France depuis 2017. Et notamment développer les circulations croisées, accroître l’accueil des talents africains en Europe, valoriser les compétences des diasporas qui sont un pont. De même, afin de développer les investissements productifs et la création de richesses en Afrique,les Etats membres devront, en concertation avec les Etats africains et les diasporas, travailler à la création d’un dispositif permettant de valider et pérenniser les transferts d’argent. En définitive, un nouveau traité nécessaire pour l’Afrique et l’Europe parce qu’une partie de la croissance du monde se jouera en Afrique et parce que nous formons une communauté de destins !

Sira Sylla est députée LREM de la 4e circonscription de Seine-Maritime.